dimanche 13 septembre 2015

[Ecrit personnel] Lettre à M. Courage.

À toi, monsieur Courage,

Je n’aurais jamais cru qu’un jour je lirais autant de souffrance, de douleur et d’incompréhension dans un regard. 
C’est assise derrière ma télévision, bien confortablement, que j’ai fait ta connaissance. L’objectif du cameraman s’est fixé sur ton visage et ton regard a transpercé mon âme. 
Ton regard perdu dans cette immensité bleutée, ton visage tendu vers moi, au milieu de centaines d’autres ; tes lèvres gercées par la soif et le sel des embruns ; ta peau brûlée par le soleil si cruel ; ils hantent ma vie pour l’éternité. 

Je ne connais pas ton nom ni ton âge, mais je connais une partie de ton histoire et je suis admirative, car malgré tout ce que tu as traversé et traverses encore, tu gardes espoir et tu aimes la vie. 
J’essaie d’imaginer toute la force et le courage qu’il t’a fallu pour quitter ainsi ton pays, tes racines, tes amis, ta famille et tout ce que tu possèdes. Tu as eu le courage de fuir l’horreur, la violence, l’outrage et la barbarie avec l’espoir d’un lendemain meilleur ; mais la déception était au bout du chemin. Tu ne le sais pas encore, mais tu as quitté l’atrocité pour un autre de ses visages. Tu pensais qu’après ce que tu avais enduré, tu trouverais une main tendue, mais tu te retrouves être l’instrument de la haine, de la peur et de l’incompréhension d’un peuple qui t’utilise, comme d’autres, pour justifier leur propos haineux, leur rejet de l’autre et leur racisme. 

On t’appelle migrant, mais pour moi ton prénom est Courage. Tu es l’homme qui représente tous ceux qui vivent les mêmes heures sombres que toi. 
On me dit naïve, dans mes propos, mes croyances ou mes émotions, mais il n’en est rien. Je connais l’horreur dont tu es victime, car la connerie et la méchanceté humaine, même si elle se cache derrière des centaines de noms, elle est toujours la même. Je suis juste maladroite dans mes propos, mais mon cœur est vierge de toute arrière-pensée. 

Ton existence, et celle des tiens, est liée à la mienne, car ton regard m’a bouleversé, toi qui assis dans un bateau coulant, à bout de force et hébété par la chaleur, la soif, la faim et la peur, a su rester digne devant le comportement insensible de ton pays d’accueil. Tu as bouleversé ma vie… 

Je n’ai pas de pouvoir, pas de milliard de billets en banque, mais je t’offre mes bras, mon cœur, ma voix pour te défendre et porter ton combat. 
Car ton combat, Courage, est celui de l’humanité entière, qui que l’on soit : migrants-courage, salariés, retraités, milliardaires, sans abris, sans papiers, sans travail… 
Ensemble, notre combat fera bouger les choses. C’est notre génération, solidaire, qui construira un monde meilleur. 

C’est avec maladresse, tendresse et sincérité que j’ai décidé de t’écrire ces mots, car mon cœur saigne devant ta douleur et que malgré tout, je garde l’espoir que nous nous lierons tous ensemble contre ceux qui mènent le monde et qui ne sont intéressés que par le pouvoir et l’argent. 

Courage, tu as changé ma vie, m’a donné une conscience et c’est avec cela que je veux me battre à tes côtés.


Texte non libre de droit, protégé par copyright.
Malorie LEDUC - 2015

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